« A demain Johnie, ne fais pas trop ravages dans les bars ! » Je me retournais vers ma collègue qui me lança un grand clin d’œil. « Ahah ouais, et toi ne fais pas trop de jalouses ! » Lui répondis-je dans un grand sourire. C’était un jeu entre nous, mignonnet rien de plus. Mais on s’amusait bien. Elle me regarda avec ses beaux yeux verts avant de me faire un salut de la main, auquel je répondis. Puis me voilà partie, fermant la porte derrière moi. Au passage, je croisais une jeune maman qui se rendait à l’une des réunions du centre. En temps normal j’y participe aussi, mais pas le mercredi, ce jour-là je termine à quatorze heures. Et pas de quoi me plaindre ! Ça me laissait ainsi toute la journée pour faire ce que je voulais ! Pas de parents, pas d’obligations, pas de petit copain hypra jaloux, et pas de gosse non plus à nourrir. J’étais libre de faire ce que bon me semble ! Mais que pourrais-je bien faire de ma journée ? C’est vrai que depuis quatre ans que je vis à Miami, je n’ai pas vraiment pris le temps de tout visiter, il y a encore des coins que je ne connais que très furtivement. Et puis entre mon boulot et mes cours par correspondance, je suis pas mal occupée… Généralement, je ne sors que le weekend, et c’est toujours bondé de monde ! Les plages de Miami ne semblent même plus être faites de sable, mais de milliers de grain de corps humains. Comme une fourmilière… Les rues sont abondantes, c’est sûr que pour un solitaire, Miami n’est pas la bonne ville à choisir. Mais j’aime cet endroit, je ne regrette pas de m’y être installée. Évidemment, je n’aime pas trop les effets fourmilières dans les grandes villes, mais Miami est différente… et puis c’est l’été toute l’année, alors que demander de mieux ? J’aime l’hiver, j’en garde aussi de merveilleux souvenirs à Pise, mais un hiver trop long à tendance à me démoraliser… le printemps est la saison que je préfère ! Et à Miami, il y fait vingt degrés durant tout « l’hiver », c’est comme s’il y avait deux printemps.

A trop penser, je suis machinalement rentrée chez moi. De toute manière, je ne serais pas allée me promener dans les rues, vêtue de ma tenue de travail. Bon certes, je ne suis pas habillée comme une nonne, une infirmière ou même un clown. Mais je préfère troquer mes jeans et ma veste tailleur, contre un short et un petit top ; tout comme je troque mes bottines à talons contre une paire de Tongue. Ainsi donc, après avoir récupéré mon courrier, m’être débarrassée de mes affaires en les balançant dans le salon, m’être douchée et rhabillée, je suis fin prête à sortir. Je suis à jour dans mes devoirs, ayant tout terminé la veille au soir, et avec internet plus besoin de dépenser de l’argent dans une enveloppe et un timbre. On clique sur un bouton et HOP, envoyé !

Mais revenons à ma question existentielle du jour : que faire ? Bah, je verrais bien une fois dans la rue. J’attrape une veste en jeans, des fois qu’y aurait un peu de vent. Faut pas oublier qu’on est qu’en mars et qu’on ne dépasse pas entièrement les 22°C. Je m’exprime plus facilement en Celsus qu’en Fahrenheit, et pourtant je vis aux Etats-Unis depuis mes douze ans maintenant ! Ah mais que voulez-vous, on ne change pas une européenne aussi facilement. Je suis maintenant dehors, avec mon petit sas en bandoulière, les cheveux encore humides de la douche. Et puis d’un coup je décide d’aller me balader sur Melrose Avenue. L’endroit est joli, et je m’y plais. Bon d’accord, je plaide coupable, c’est surtout Ben&Jerry’s qui me tente follement. Je sens la crème glacée m’appeler de tout son être : « Viens me manger ! Viens me manger ! ». On ne résiste pas à un tel appel de détresse ! Que penserait cette glace de moi sinon ? Non non non, je décide de l’honorer en allant la manger. Et me voilà arriver devant le fameux glacier. On dit que l’amour donne des ailes, tout comme redbull, en ce qui me concerne ce sont les glaces qui me font voler !

J’entre dans le bar laitier entièrement climatisé et j’attends derrière deux personnes. Une femme et sa fille qui trépigne d’impatience de dévorer sa glace, amusée, je constate à quel point elle me fait penser à moi. « Bonjour mademoiselle ! » Me dit le vendeur sur un ton enjoué. « Bonjour ! » Lui répondis-je alors dans un grand sourire. « Alors pour moi ça sera une glace cookie dought s’il vous plait. Un grand pot de préférence, je suis affamée et surtout gourmande. » En riant, il me servit et me souhaita bon appétit après que je l’eus payé. Je le remerciais et sortait pour déguster ma glace sur un banc en observant les gens passer. En ouvrant la porte, je manquais de justesse d’assommer un grand type. Ç’aurait été fort dommage d’abimer un aussi beau visage ! « Oh, excusez-moi ! » M’exclamais-je en rattrapant la porte. Je crois que son regard me troubla un peu… mais juste un peu hein, héhé. Je lui souris, et sortit en m’effaçant pour le laisser passer.

J’eus vite fait d’oublier cet incident en m’asseyant sur mon banc pour déguster ma délicieuse glace. Et j’étais tranquille depuis deux minutes, quand une voix me sortit de mes pensées. « Puis-je m’asseoir ? » Oh bah ça, celui que j’ai failli tuer… est-ce qu’il veut se venger et me faire payer ? « Euh oui, bien entendu. Ce banc est à tout le monde. » Répondis-je en me décalant d’un cran. Assise en tailleur, je pris une bouchée de ma glace en dévisageant le beau brun à mes côtés. Quand il me regarda, je lui souris bêtement avant de reporter mon attention sur ma glace et sur les passants (qui pour certains avaient une dégaine à mourir de rire !).